Politiques Etrangères

Publié le par David Leterrier

    Ségolène Royale a enfin clarifié ses positions sur la politique étrangère qu'elle entend poursuivre. Elle a dit, ou redit, qu'elle approuvait l'opposition à la guerre en Irak manifestée par J. Chirac, et qu'elle poursuivra la ligne tracée par le général de Gaulle, et par Chirac. C'était jeudi dernier sur TF1.
Qu'est-ce qui rend cette déclaration crédible ?

On a pu en effet remarquer que, devant quatre années de bourbier où se sont enfoncés les USA de Bush et le Royaume-Uni de Blair, tous les candidats ont choisi de féliciter, après coup, le choix du président français de dire "sans moi" et sans la France, aux 'va-t-en-guerres' qui prétendaient sentir mieux que les autres le sens de l'histoire.
    A l'époque pourtant, il faut rechercher qui n'a pas reproché "l'arrogance" du discours de D. de Villepin devant l'ONU (la guerre serait donc une affaire "de style"). Il faut chercher le journal qui n'a pas vu dans ce refus poli de la France, un aveu de faiblesse, une insolvabilité économique et une perte d'influence fatale. Car, chez les intellectuels comme chez les "spécialistes" (souvent improvisés) du Moyen-Orient, tant prisés des médias d'alors, on aime les muscles, on raffole de la puissance, et de son ivresse ! Tandis qu'outre Atlantique, certains allaient même jusqu'à déduire que la France était dans le fond antisémite, puisqu'elle se refusait à combattre un ennemi d'Israël ! Une volonté de paix au Moyen-Orient serait-elle vraiment contraire aux intérêts d'Israël, comme le prétendent ces "amis auto-proclamés" de Tel Aviv ?

Mais si tous les candidats se sont rendus à l'évidence que cette campagne militaire était une erreur, on peut à bon droit se demander qui, parmi eux, aurait le courage réel de dire non à plus grand, plus puissant et plus riche que soi.

Ségolène Royale a d'abord distingué le peuple américain de la personne de son président George W. Bush, elle a ensuite dit non à un alignement automatique avec les USA, préférant projeter dans une Europe à construire son accord avec le gouvernement et le peuple Allemand, qui ont refusé cette guerre de manière encore plus inattendue que la France.
    Il faudrait rechercher, parmi ceux qui ont tant déploré le non à la constitution européenne, ceux qui refusèrent alors de voir, dans la convergence de ces deux grands pays bientôt rejoint par l'Espagne, la naissance d'une politique européenne authentique —parce que ces choix politiques ne satisfaisaient pas leur soif de guerre, et leur vision religieuse des choses du monde.
Quelques mois plus tard, ils se prétendirent pourtant les plus européens du monde, traitant d'imbéciles et de réactionnaires les électeurs que leurs diatribes assourdissantes ( et les manipulations de Blair envers la Pologne et autres pays fraîchement européens) avaient plongé dans la confusion quant à une quelconque politique étrangère de l'UE.

Lorsque P. Poivre d'Arvor lui signala que M. N. Sarkozy, la veille, avait lui aussi félicité Chirac pour cette décision, Ségolène fit remarquer que ce n'était que du bout des lèvres, car il avait ostensiblement été voir M. Bush avec une évidente sympathie, et même "pour s'excuser de l'arrogance de la France à l'époque" ajouta-t-elle.
    Et il est vrai que les journalistes experts étasuniens ne s'y sont pas trompés, tel John Vinocur, du New York Time, qui prophétisait que Bush aurait peut-être, pour finir son mandat, la bonne surprise d'un allié inattendu dans la personne du nouveau président français, si Sarkozy était élu.

Ségolène Royale a ensuite finement observé que le principal soutient européen de son concurrent n'était autre que Sylvio Berlusconi, dont on connaît l'engagement fervent dans la guerre d'Irak et la politique néoconservatrice.
    Les services secrets italiens sont même allé jusqu'à fabriquer un faux grossier tendant à prouver que Saddam Hussein cherchait à se procurer de l'uranium au Niger —un scandale pas encore éteint, qui donna la fameuse affaire Valery Plame-Wilson, l'espionne de la CIA trahie depuis la Maison Blanche — affaire que Tony Blair n'hésita pas un jour à qualifier de piège tendu par la France (à cause de l'implication d'un ressortissant français douteux), pour cacher ce nième cafouillage, alors que les services français avaient déjà dit aux américains que c'était une fausse piste !

Tout cela rend crédible la déclaration d'indépendance de S. Royale, et sa fidélité à la tradition gaullienne quant aux orientations de la politique étrangère française, que les électeurs risquent bien de ne pas réduire à une simple affaire "de style".

Mais tout cela passe bien au dessus de la tête de Nicolas Sarkozy, qui déclarait hier dimanche qu'il entendait faire de la France "le pays le plus prospère du monde" ! En cent jours sans doute…
Le monde n'a qu'a bien se tenir, et choisir un numéro pour Nicolas 2, 3, ou 4 ?

Comme pour ses (rares) déclarations sur la politique étrangère, les velléités du candidat Sarkozy s'arrangent pour être peu contestables et proches des sondages, mais elles demeurent très peu crédibles.

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